Apéritifs traditionnels, un parfum vintage.
Les périodes de crise engendrent souvent un retour aux valeurs traditionnelles et le renouveau des apéritifs vintage semble en témoigner. Les amers, qui ne cessaient de perdre des consommateurs depuis une vingtaine d’années, semblent avoir freiné l’hémorragie par les innovations.
La catégorie ambitionne même aujourd’hui de recruter de nouveaux adeptes. Les amers sont incontestablement dopés par l’arrivée de nouveautés. Picon (chez MHD), leader de la catégorie avec 74 % de PDM (7 M de cols eq. 70 cl), a lancé le Picon citron pour rebondir sur une consommation déjà existante traditionnellement dans le Nord et l’Est, terres de prédilection accaparant les deux tiers des ventes de la marque.
L’objectif est d’ailleurs de « dérégionaliser la consommation avec un ready-to-drink qui facilite le cocktail à partir d’une recette intergénérationnelle, qui la démocratise et qui peut se révéler un vrai levier de recrutement » estime Marie-Domitille Marcouire, chef de produit chez MHD.
Pour cela, la marque s’en est donné les moyens avec une campagne nationale d’animation de 500 jours en magasins (dont 50 % dans le Nord-Est) complété par des animations-dégustations en fin d’année dans le Nord et l’Alsace et des offres promos en CHR. La saga de l’été en affichage et abribus a également été axée sur le citron.
Pour ses 175 ans, la marque, outre la sortie de deux éditions limitées, un verre on pack et une bouteille customisable sur Facebook, avait déjà tenté un coup de rajeunissement de son image via le comédien Lorànt Deutsch. La nouvelle référence Citron vise aussi des volumes additionnels en plus du Picon classique (avec la bière ou eau de Selz) et du Picon Club (avec le vin blanc, plutôt dans l’Est et pour une clientèle féminine). « L’arrivée de nouveaux concurrents prouve qu’il y a des volumes à aller chercher » conclut Marie-Domitille Marcouire.
Outre une Salers Bière en préparation chez Pagès Védrenne pour 2013, Suze a aussi adopté une nouvelle stratégie de redynamisation sur ce créneau en lançant au printemps un Suze pour bière avec une formule différenciant celle du leader, un goût plus rond et fruité au parfum de gentiane. « Les amers sont en recul structurel depuis plus de 20 ans, concurrencés par les ABV et les portos mais la catégorie qui pèse encore environ 10 M de l. peut recruter, parmi les consommateurs traditionnels de plus de 50 ans mais aussi parmi les jeunes consommateurs de bière » commente Adrien Timpano, chef de produit chez Pernod.
Comme le marché est très régionalisé, nous avons d’abord embauché une ambassadrice pour organiser des dégustations dans l’Est, en CHR (dans les bars de Strasbourg, Colmar, Nancy…) et chez Metro, avant de proposer des dégustations événementielles dans le Nord qui représente quand même 20 % des ventes. »
Après la stratégie d’éditions limitées de créateurs (jusqu’en 2009) qui n’avait pas obtenu les résultats espérés, la marque a misé sur l’innovation avec deux versions aromatisées, fruits rouges et agrumes, devenues respectivement en 2011 n°3 et n°5 des ventes dans les innovations spiritueux. Avec ces deux nouvelles Suze assorties d’une plateforme cocktails en ligne, de livret de recettes et de cours cocktails à l’Atelier des chefs, la marque a recruté 175 000 foyers acheteurs en un an, un peu plus jeunes, mais fidélise aussi sa cible habituelle. D’autres innovations sont également à l’étude.
Autre renaissance réussie, celle de Lillet (Ricard) qui se porte très bien en France, d’abord par un regain de référencement mais aussi de gain de volumes et de PDM, notamment sur l’été dernier. La marque qui représentait 540 000 l. en 2007 au rachat par Ricard (dont 50 % en France, 40 % aux États-Unis) avoisine désormais le million de litres : 300 000 l. en France, 250 000 aux États-Unis, autant en Allemagne où Lillet enregistre « un vrai boom notamment auprès des femmes “trendy chic” de 30 ans et +, explique Florent Leroi, chef de groupe Apéritifs. L’introduction du Lillet rosé il y a un an et demi a remporté un franc succès avec déjà 20% du global. »
Développé pour l’international, notamment pour l’Espagne, il devrait arriver en France courant novembre, poussé par le buzz, d’abord sur la région bordelaise puis dans le reste de l’Hexagone. « Nous allons le positionner comme un premium rosé face aux portos, aux rivesaltes et aux vins rosés haut de gamme à plus de 10 €, et communiquer notamment sur sa mixabilité avec le champagne en Lillet Royal ».
Le Lillet blanc, recette originale qui pèse 70% des volumes, était déjà promu en cocktails, notamment dans le fameux Vesper de Casino Royale, même si Florent Leroi reconnaît que « l’effet James Bond n’a parlé qu’aux initiés mais il a participé à la construction de la marque et à son capital sympathie ».
En matière de rosé, Porto Cruz a su créer une catégorie et communique régulièrement sur les cocktails en particulier sur les fins d’année. « Le marché des apéritifs reste difficile, reconnaît Anna Luc, directrice marketing de La Martiniquaise.
Il manque de visibilité et d’animations mais en tant que leader de la catégorie, on se doit de tenter d’élargir les moments de consommation. Après tout, le porto est le seul spiritueux qui peut se boire de l’apéritif au digestif et même à table ou en cocktail, notamment avec le Pink Lady. »
Le porto Cru rosé atteint désormais 8% des ventes de la marque. La Martiniquaise a également entrepris de relancer les apéritifs de terroir comme Avèze (500.000 l.). Après un relooking, il a bénéficié d’une grande campagne d’affichage régional et d’une boutique éphémère en fin d’année sur Paris à la Bellevilloise.
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Lire le dossier en entier dans la RVI 3903 de novembre 2012