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Quand le Beaujolais Nouveau est arrivé.

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Le sexagénaire Beaujolais Nouveau, après un succès intempestif dans les années 1970-80 et les dérives qualitatives dans les années 1990, tente de reconquérir plus sereinement le palais des consommateurs.

Photo FH : Bernard Pivot à la tête du Comité de Défense du Beaujolais avec Perico Legasse en train de lire l’article sur le Beaujolais Nouveau de la RVI.

Le Beaujolais Nouveau n’est pas né d’une idée marketing mais d’une note administrative de 1951 autorisant les vignerons à débloquer avant la date de commercialisation officielle du 15 décembre des volumes de vin pour bénéficier d’un peu de trésorerie dans une région pauvre vivant surtout d’élevage et de maraîchage. Le premier arrêté précise les conditions de dérogation à date variable ; ce n’est qu’en 1967 que celle-ci est fixée au 15 novembre jusqu’en 1985 où un nouvel arrêté préfère instaurer le 3ème jeudi de novembre afin d’éviter les week-ends et pour s’éloigner du 11 novembre férié.

Le Beaujolais Nouveau, produit sur l’ensemble de l’aire d’appellation Beaujolais et Beaujolais Villages (Rhône et Saône-et-Loire), est élaboré à base de gamay noir à jus blanc, cépage précoce à fort rendement. La vinification avec macération de grappes entières, obligatoirement vendangées à la main, donne des vins peu tanniques, fruités et colorés, aux notes de bananes et bonbonnes anglaises dues à la levure 71B qui tend à être remplacée ces dernières années par d’autres levures accentuant plutôt les notes de fruits rouges.

Le Beaujolais Nouveau doit son succès à quelques ambassadeurs passionnés : Maurice Maréchal, fondateur du Canard Enchaîné, qui vient régulièrement dans le Juliénas ; Curnonsky, créateur de l’Académie Rabelais qui tient session au Château de Thivin à Brouilly et créé en 1954 la Coupe du Meilleur pot (Le Beaujolais Nouveau est servi traditionnellement dans des “pots lyonnais” en verre de 46 cl.) ; René Fallet qui reprend en 1975 pour le titre d’un livre l’expression qui courait alors dans les bistrots de la région : “le Beaujolais Nouveau est arrivé” ; et bien sûr le négociant Georges Duboeuf qui a cru dès les années 1960 à ce vin rapidement buvable qu’il va entreprendre de commercialiser en France et dans le monde entier.

« Des acteurs comme Pierre Brasseur, Lino Ventura ou Jean Carmet n’hésitaient pas alors à se montrer un verre à la main dans les années 1970 » rappelle Michel Rougier, qui a dirigé l’interprofession pendant une vingtaine d’années.

L’équipe du Petit Rapporteur, notamment Pierre Bonte et Stéphane Collaro, se font également les chantres du Beaujolais Nouveau. En 1975, un lancement est diffusé à la télévision du Palais Bourbon avec Georges Brassens, ami de René Fallet comme parrain et Mireille Mathieu comme marraine. Alors que le vin primeur s’est développé, principalement à Paris dans les années 1970, il prend de l’ampleur dans les années 1980 grâce aux exportations dans les autres pays européens, notamment en Grande-Bretagne, en Allemagne et en Belgique, avant de conquérir l’export plus lointain dans les années 1990, en particulier les États-Unis, le Japon et le Canada. « C’est la décision du jour fixe de livraison à minuit heure locale pour le monde entier qui a créé le mythe » estime Michel Rougier. D’où le succès accru au Japon, le premier à pouvoir faire sauter les bouchons de Beaujolais Nouveau, décalage horaire oblige.

Duboeuf a largement contribué à faire connaître le vin en révolutionnant les étiquettes, remplaçant les visuels traditionnels à la bourguignonne, par des visuels colorés aux motifs floraux en collaboration étroite avec l’imprimerie du Clos du Moulin. S’enfournant dans la même brèche, on voit apparaître des oiseaux sur les étiquettes de Louis Tête, des carrés design aux couleurs vives sur celles de Coquart, des bouteilles sleevées jaune et rose fushia en 2000 chez Patriarche, Mlle Mommessin dessinée chaque année par un artiste différent, la maison du groupe Boisset ayant également adopté au XXIème siècle pour un bouchon en plastique.

Le Japon est devenu le principal débouché du Beaujolais Nouveau à l’export, 2005 étant l’année record avec plus de 11,5 M de bouteilles (l’Allemagne était le premier pays dans les années 1990). L’arrivée du primeur se fait à grand renfort de mises en scènes sur écrans géants avec compte à rebours, baignoires géantes de beaujolais, campagnes de pub dans le métro de Tokyo et soirées organisées dans des centaines de restaurants.

(…)

Lire la suite du dossier dans la RVI 3903 de novembre 2012.

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