Vignerons de Saint Marc : des appros sécurisés.
De plus en plus, ces dernières décennies, les coopératives ont été confrontées à l’hémorragie de leurs adhérents, notamment des plus jeunes. La cave des Vignerons de Saint Marc à Caromb (84) dans le Ventoux a perdu en dix ans une centaine d’adhérents (aujourd’hui ils sont 250). Stephan Constant-Reymond, jeune directeur de la cave, fils d’adhérent sortant de grande école de commerce, s’est penché sur la question pour tenter de sécuriser les appros en raisins.
La coopérative a donc créer une filiale d’acquisition de foncier et d’exploitation, en partenariat avec la famille Perrin, producteur négociant rhodanien, la CAPL (Coopérative Agricole Provence Languedoc), Olivier Mazzoli (société de produits de la mer apportant une autre vision d’exploitant confronter à la sécurisation de matières premières) et le distributeur C10. Le principe de la nouvelle structure est de racheter sur le bassin de production Sud Ventoux des vignobles qu’elle fait exploiter par les adhérents de la cave.
Le programme d’acquisition prévoit une centaine d’ha sur quatre ans avec une enveloppe de 1,6 M€ (dont 66 % provenant de la cave). « Au départ, on compense le manque à gagner des départs en retraite, explique Stephan Constant-Reymond. Après, on développera car on a évalué à 30 % les adhérents ayant une succession potentielle. » Il s’agit également de profiter d’un prix du foncier encore abordable dans la région, entre 10 et 15 000 €/ha dans un rayon de 20 km autour de Caromb. La véritable innovation réside dans la formule proposée : la Cession Temporaire d’Usufruit (CTU) : la nue propriété reste à la SAS, l’usufruit est accordée à un adhérent avec promesse de vente.
La CTU qui passe par un acte notarié privilégie les exploitants actuels et permet de réinjecter des surfaces dans la coopérative. « Le fermage présentait l’inconvénient d’être signé pour neuf ans alors que l’engagement dans la coop court sur cinq ans, précise Stephan Constant-Reymond. Nous ne pouvions pas mobiliser des fonds propres pour un adhérent qui aurait la possibilité de garder le fermage encore quatre ans s’il décidait de sortir de la coopérative. » « C’est une solution sociale pour les vignerons et une sécurisation d’approvisionnement pour nous, confirme Pierre Perrin, dans le négoce du Ventoux depuis 40 ans avec la Vieille Ferme et partenaire historique de la cave de Caromb.
Dans la perspective du réchauffement climatique, nous nous intéressons d’autant plus au Ventoux, plus frais, notamment pour replanter des cépages secondaires comme la syrah, peut-être du carignan et du cinsault afin de rééquilibrer le grenache, trop chaud. » Pour C10 dont la participation représente le premier engagement hors distribution, il s’agit de « pérenniser un sourcing fiable et régulier, précise Xavier Alberti, directeur de C10. Le meilleur business est quand chacun est à la limite de ses compétences avec un représentant pour chaque maillon, de l’amont à l’aval. »