Rencontre entre Frédéric Panaïotis et Vik Muniz

« Un artiste brésilien mondialement reconnu et un artisan champenois, voilà une association surprenante. Et pourtant, nous nous sommes mis à parler de botanique, de fleurs, de plantes et d’arbres et notre complicité a été immédiate. Notre rapport intime à la nature nous a permis de nous comprendre immédiatement. Vik Muniz est un artiste étonnant qui ne parle jamais vraiment de son sujet, mais d’un faisceau d’éléments qui, si on les assemble tel un puzzle de l’esprit, donnent alors du sens à l’idée. Du temps et du recul sont nécessaires pour appréhender sa pensée. Lorsqu’il est venu me voir à Reims, nous avons passé de beaux moments dans les vignes, bien sûr, mais aussi dans la forêt des Faux de Verzy, avec ses arbres hors du commun. De là est né un échange qui m’a mené jusqu’à Rio où Vik m’a entraîné dans son univers et son monde végétal à lui : le jardin tropical qui entoure sa maison et la fameuse allée des figuiers qui mène au jardin botanique qui lui a donné le goût pour la nature.

Quand la Maison Ruinart lui a donné carte blanche afin d’apporter sa vision créative de notre Maison, il est parti du fondement : la terre et la vigne. Et c’est bien de là, qu’en tant que Chef de Caves, je tire la quintessence même de mon métier. Surtout cette année où les superlatifs manquent pour définir la vendange 2018 ! De cette vision commune, je retiens la tension créative qui nous habite tous les deux. Celle qui nous donne l’énergie de créer. Lui sans se fixer de borne ni de limite, moi dans le respect d’une tradition de 290 ans que je dois faire évoluer en écoutant la nature. Deux approches qui peuvent sembler s’opposer, mais qui tirent pourtant leur source dans des racines communes bien plus prégnantes que je n’aurais jamais pu l’imaginer.

Cette année, nous amorçons aussi notre programme “Food for Art”, des expériences inédites issues du travail de chefs et d’artistes autour de nos vins. Nous débuterons avec David Toutain, tout récemment auréolé d’une 2ème étoile Michelin, qui est venu à la rencontre de notre duo à Reims. Ce livre est le témoin de notre belle histoire. Celle d’artistes, d’artisans pour qui tout commence avec la nature. J’espère que vous ressentirez, comme nous avons pu le vivre, la force créative qui nourrit cette aventure. » Frédéric Panaïotis, Chef de Caves de Ruinart

Vik Muniz a longuement observé et pensé avant d’emprunter le chemin de la création lors de sa résidence artistique à Reims, menée à l’invitation de la Maison Ruinart. À travers ses œuvres, il cherche à exprimer ce qui lui semble indicible par le langage. Pour lui, l’exceptionnel naît au cœur de la complexité et le flux créatif en est la meilleure représentation. En 1991, Vik Muniz découvre l’observation des arbres au jardin botanique de Brooklyn. Il en tire une analogie avec le Butoh, danse traditionnelle japonaise, sur la rencontre de la liberté et de la contrainte qui donne naissance à la tension, élément essentiel à tout projet artistique. À l’occasion des vendanges 2018, Vik Muniz passe de longues heures à Sillery, vignoble historique de la maison Ruinart et l’un des plus septentrion aux d’Europe, situé sur la montagne  de Reims. Il est accompagné par Frédéric Panaïotis, Chef de caves de la Maison. Curieux et toujours passionné par la nature, Vik l’interroge sur ce vignoble et s’étonne a lors de comprendre que règne en Champagne un climat rigoureux qui semble peu propice à la culture de la vigne. Pourtant, c’est dans cette adversité que la vignes se surpasse et offre le meilleur d’elle-même. Comme un réflexe de survie, le chardonnay et le pinot noir produisent leurs meilleurs fruits dans des conditions difficiles. Subjugué par le long processus de fabrication du champagne Ruinart, l’artiste brésilien a capté le rapport de l’homme et de la nature, incarné par Frédéric Panaiotis, maître des créations de la Maison dont les mains se retrouvent mises en scène.

Artiste protéiforme, Vik Muniz s’est exprimé dans une série d’œuvres inspirée de la notion de flux qui réinterprète les ceps de vignes à l’aide de morceaux de bois noircis et des fusains. Il a aussi donné vie à un e feuille de Chardonnay, cépage emblématique du goût Ruinart, à base d’éléments organiques issus du vignoble de Sillery. Pour Vik Muniz, plus le chemin est ardu, plus l’œuvre est belle. Nul doute que le chemin fut, au regard de ses créations, très complexe.